La voie océane

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" A l'abri des tempêtes une vague fume dans le soir "

   A toute épreuve, Confections, XIII, Paul Eluard.

 

LA VOIE OCÉANE





  Océaniques I
(extrait)





              Terre



Comme une larme dans la nuit





Vieil arbre
Aux profondes racines
Dans le secret des terres
Tu puises ta passion
Immuable






Bras de la mer
Brise de sel
Tu sens le large

Vague craintive
Ou vague folle
Tu frôles l'horizon

Souviens-toi des marins






Équinoxe intérieur
Tu déchires les jours
Par tes vents insensés
Équilibre de fou
Tu brises nos raisons

 




Frisson de pierre
Dans une nuit de brume
La terre a doucement frémi
Réveillant quelques rocs assoupis

Aux cassures

Millénaires


Ta mémoire a vibré






L'ombre du temps
S'est posée
Ce soir

Ombre de ton désir

Les nuits sont si profondes
Lors tu v
acilles
Encore






Partir à travers toi
Suivre de douces pentes
Et glisser tièdement
Dans le creux de tes bras






Voilier des songes
Oiseau de brume
Lune éternelle
Comme une pluie étincelante
Au coeur d'une nuit orageuse
Vagabonde ton âme






Vol inquiet des oiseaux
À l'approche du vent d'automne
Quand les cimes lointaines
Sentent déjà la neige






Roule la lune sur la dune
Et plonge
Dans un creux
Noir de silence



etc.


 

             

 

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Océaniques II
(extrait)





Ohé vieux capitaine
Les marées ont passé
Accrochées à la lune

Et les côtes brumeuses
Ont patiemment senti
Les galets et les sables
Rouler dans chaque vague

Même d'anciens courants
Que tu connaissais bien
Ont frôlé quelquefois
Les ports où tu mouillais

Ohé vieux capitaine
Bois-tu encor* ce rhum
Au fond d'une taverne
Songeant à un trésor
Enfoui dans ton île

Ou à la jeune fille
Aperçue sur un quai
Voilà bien des années




 

J'ai scruté l'horizon
Et j'ai compté les vagues
J'ai attendu les soirs
Aux matins je dormais




 

Depuis tant de saisons
Le silence des mers
A brûlé mon visage

Les mots ont dérivé

L'écho de tes regards
A glissé sur la houle




 

Et puis les yeux s'emplissent
En lisière du jour
Des reflets d'autres terres

Tel le flot qui revient enfin infimement
Avec quelques éclats cachés de coquillages

Tels des mots s'échouant
Après un grand naufrage
Oublié
Sur des pages
Inconnues




 

Au seuil d'une heure tiède
À peine entraperçue
À l'instant incertain
Où frémit le matin
Au milieu du murmure
Des bois et des étoiles
Un rêve chiffonné
Passe



* orthographe poétique évitant un pied.

etc.


 

 

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Océaniques III

                           (extrait)



Failles insoupçonnées
De nombres infinis
Que l'on soustrait
À chaque grincement
Du temps
Comme un flot de secondes
Abandonnées aux vents
Mi-solaires
Mi-lunaires
Vers des crêtes stellaires
Déjà éteintes
Entraperçues
Au fond des âges





Falaises


Immémoriales ruines
D'une terre incertaine
Au fil des ères
Renversées maintes fois
En ses entrailles vives
Aujourd'hui pétrifiées

Rocs attaqués en tes confins
Par la cadence
Des océans
Que tu portes
Complices
De la lune et des vents
Rocs qui se raccrochent
À toi
Encor pour quelques siècles
Rocs qui s'écroulent enfin
Au bout de millions de tempêtes
Usés
Rocs émiettés
Éparpillés





Autre complicité
Entre un roc assailli par les derniers efforts
D'une houle lointaine
Et son écho
Surpris
Au détour d'un rivage





Pages pavées de lettres
D'où surgissent
D'insensées barricades
Vieux temps désorientés par de nouveaux accords
Écriture entaillée par d'autres avenirs
Phrases incontrôlées
Qui se mêlent
À travers les chapitres
Malgré les paragraphes
Chassent points et virgules
Tous traîtres ponctuant
Et des hordes de mots
Étranges
Assaillent désormais les dictionnaires
Suspects
Prêtes à abolir
Tout ordre alphabétique





Horizontalité
D'un espace en devenir d'un passé incertain
Vertical

Espace à peine infini
Où déjà le temps
Jailli d'un centre dilaté
En ses propres limites
Peu à peu se fige





Folle sphère
Sortie d'une étreinte insensée
Lorsque le temps surgit dans sa fuite éperdue

Folle sphère
Petit débris d'une énergie crystallisée*
Enivrée par quelques milliards si éphémères
D'identiques révolutions

Folle sphère
Isolée
Où un grain de matière
Après maintes déclinaisons inertes
Dans ses divagations océaniques

S'agita


* vieille orthographe...


 etc. Clin d'œil



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Commentaires

  • Chantal J.

    1 Chantal J. Le dimanche, 19 janvier 2014

    Pour moi qui aime voir, sentir, écouter la mer,
    Naviguer en son sein humide
    Epouser ses courbes rondes
    Enveloppantes,
    Ces poèmes La Voie océane
    Sont une pure merveille
    De cristal et de lumière...

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